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PROGRAMMES DE FILMS EXPÉRIMENTAUX


PROGRAMME 1 : VISIONS PHOTOCHIMIQUES

SAMEDI 18 MAI
11 H

CARRÉ 150 (Salle F. Lemaire)
15 $

Ce programme de films propose de plonger dans un univers où la nature et les portraits de famille se mêlent dans une grande variété de techniques qui explorent la matérialité de la pellicule et offrent une réflexion sur la vie, la mort et notre connexion au monde naturel. On y retrouve « Frequency Objects » de JULIE MURRAY, fusionnant des images de photos familiales et des objets photogrammés dans une exploration du mouvement et de la mémoire et « Deep 1 » de PHILIP HOFFMAN, une méditation diaristique sur la transformation organique de la pellicule. Explorez les récits captivants de survie à la foudre dans « Le spectre visible » une collaboration de MAXIME CORBEIL-PERRON et SARAH SEENÉ, puis plongez dans « P L U M E » de MIKE ROLLO, une réflexion visuelle sur le déclin des oiseaux au Canada. ANNIE ST-JEAN propose ensuite une vision poétique du temps et de la lumière à travers des photographies prises en sténopé dans « Capter le fuyant ». Pour continuer notre plongée dans la matérialité de la pellicule, on retrouve aussi « A Perfect Storm » de KAREL DOING qui transforme la nature en paysage imprimé sur une émulsion argentique. Enfin, « Bye Bye Now » de LOUISE BOURQUE, un film hommage aux archives familiales et à la mémoire. Ce programme promet une exploration cinématographique riche et émouvante.

JULIE MURRAY « Frequency Objects »
Vidéo, 5 minutes 30 secondes, États-Unis, 2014
« Frequency Objects » est un film en deux parties. La première combine des négatifs de photos de famille, des photogrammes et des fragments de film 35mm trouvés, dans un montage qui trouve la friction entre l’animation et le mouvement fluide des images de film. Par des arrêts et des départs imprécis, on aperçoit des fragments d’images, des figures à moitié dans le cadre et à moitié hors du cadre, des visages soudain sont produits. Dans la deuxième partie, le motif est texturé et divers objets photogrammés produisent des ombres à leur propre échelle.

PHILIP HOFFMAN « Deep 1 »
35mm (vidéo), 14 minutes 30 secondes, Canada, 2023
Filmé sur 2 ans (2020-2022), à la maison et à l'extérieur, « Deep 1 » est une méditation diaristique, une fleur/plante transformée et décomposée avec de l'extrait de jacinthe et de lichen. Des animaux ailés et à quatre pattes, sauvages et domestiques, parcourent le cadre marqué par une pratique artisanale. Tourné à Mount Forest, en Ontario et à Dawson City, au Yukon.

SARAH SEENÉ ET MAXIME CORBEIL-PERRON « Le spectre visible »
Super-8 & 16mm à Vidéo, 18 minutes, Québec, 2022
La foudre désigne la combinaison du tonnerre et de l’intense rayonnement électromagnétique dont les composantes se situent dans la partie visible du spectre. Aussi imprévisible que soudain, ce phénomène naturel laisse des traces chez celles et ceux qui en font la singulière expérience. « Le spectre visible » tisse le portrait de cinq personnes dont on ne peut pas dire qu’elles ont été foudroyées - mais plutôt « fulgurées » - puisqu’elles ont survécu à l’impact de la foudre. Chacune de leurs expériences se révèle unique par sa corporéité, sa dimension métaphysique ou sa signification philosophique. À travers l’intimité de leurs récits, l’essence de leurs visages, de leurs voix et de leurs corps, et soutenu par la présence méta-médiatique d’une texture filmique électrisée par des charges statiques, ce court documentaire élabore une réflexion sensible à propos de la vie lorsqu’elle a si soudainement effleuré la mort.

MIKE ROLLO « P L U M E »
16mm, 7 minutes, Canada, 2022
« P L U M E » répond à un rapport sur l’état des oiseaux du Canada publié en 2019 par Environnement et Changement climatique Canada selon lequel la diversité et l’abondance des oiseaux du Canada sont en fort déclin. « En pensant à ce rapport, aux effets du changement climatique et à notre interconnexion avec le monde naturel, je suis devenu un passionné d'observation des oiseaux, enregistrant les chants des oiseaux et collectant et étiquetant les plumes et les mélanges de duvet jetés ». Les images de « P L U M E » sont des empreintes de plumes trempées dans une solution de développement à base de plantes, une technique de phytogramme développée par le cinéaste KAREL DOING, et réanimées à l'aide de techniques d'impression optique et d'édition numérique.

ANNIE ST-JEAN « Capter le fuyant »
Vidéo, 6 minutes, Québec, 2023
La photographie prise en sténopé agit comme un baume sur la fragilité et la puissance du fuyant. Tandis que le contraste sobre et pur de la juxtaposition de deux intervalles d’un même espace-temps nous rappelle l’unicité de chaque instant. Le temps fuit, la rivière coule et la lumière se joue de nous.

KAREL DOING « A Perfect Storm »
16mm, 3 minutes, Angleterre, 2022
« A Perfect Storm » est un film-paysage, ou plus précisément, un paysage imprimé sur une émulsion argentique. L’artiste s’est servi de graines, de petites fleurs, et d’autres éléments végétaux de petite taille issus de plantes cultivées dans son jardin, ou d’espèces plus sauvages que l’on trouve dans une réserve naturelle non loin de chez lui.

LOUISE BOURQUE « Bye Bye Now »
35mm (vidéo), 8 minutes 27 secondes, Québec, 2022
Un hommage à l’homme derrière la caméra, celui qui a constitué ces archives familiales personnelles : le père de l’artiste, qui lui a laissé, au-delà de la mort, cet héritage fait de traces de vies passées.

WEB 1.CINEMA Bourque ByeByeNow 3


PROGRAMME 2 : L’ATTAQUE DES VIDÉOCASSETTES : L’ART DU « MIXTAPE » VIDÉO

DIMANCHE 19 MAI
11 H
CARRÉ 150 (Salle F. Lemaire)
15 $

Nous avons demandé au chercheur et commissaire Clint Enns de nous préparer un programme spécial entièrement compilé à partir d’extraits de compilations vidéo. Ces artefacts vidéo, autrefois rares, n’ont jamais été destinés à un accès à la demande ni aux masses au cœur tendre qui ne feraient pas l’effort de les trouver. Historiquement, ces vidéocassettes étaient autodistribuées et uniquement disponibles par correspondance. Pour ce programme, nous avons sélectionné les plus emblématiques des premières compilations vidéo. Vous verrez des œuvres de S.P.K., de PSYCHIC TV, de NIN, du fondateur de Film Threat, CHRIS GORE, de GEORGE BARBER avec « The Greatest Hits of Scratch Video », et des artistes RICHARD ALTMAN et SEBASTIAN CAPONE de Winnipeg. À l’aide de deux magnétoscopes, nous avons monté ces extraits sur une vidéocassette VHS pour votre plus grand plaisir. Avez-vous le cœur assez bien accroché pour regarder ça ? 18 ans et plus.

Despair | S.P.K., Australie, 1982
S.P.K est un groupe de musique « noise » industrielle fondé par Graeme Revell. « Despair » est l’un des premiers exemples de « mixtape » vidéo. Ce projet a été monté par Dominic Guerin (de l’étiquette vidéo Twin Vision). La vidéocassette originale était principalement vendue par correspondance par le groupe. La photo sur la pochette montre un fœtus siamois et comprend un avertissement en petits caractères : « Classé XXX : Attention, certains passages de cette vidéo peuvent être considérés comme extrêmement offensants. Ne pas vendre à des personnes mineures ».

First Transmission | PSYCHIC TV / Thee Temple ov Psychick Youth, Angleterre, 1982
PSYCHIC TV était la composante audiovidéo de Thee Temple ov Psychick Youth, un groupe/troupe/culte formé par Alex Fergusson et deux anciens membres de Throbbing Gristle, Genesis Breyer P-Orridge et Peter Christopherson. La vidéocassette « The First Transmission » a beaucoup circulé, même si son existence n’a été publicisée, au départ, que dans Thee Gray Book (1983), un ouvrage lui-même disponible uniquement par le système de vente par correspondance de PSYCHIC TV au début des années 80. Richard Metzger, rédacteur en chef de Dangerous Minds, décrit la conception de l’œuvre : « Pour défendre le projet, Genesis m’a dit que ce matériel était plus ou moins conçu pour être diffusé sur la chaîne câblée new-yorkaise Channel J, notoirement sordide. L’idée consistait à faire apparaître ce matériel étrange, onirique, sur les téléviseurs, tard dans la nuit, sans avertissement ni la moindre explication. »

The Greatest Hits of Scratch Video [Vol. 1 & Vol. 2] | GEORGE BARBER, Angleterre, 1984 / 1985
Le vidéaste britannique GEORGE BARBER, fondateur du mouvement « scratch video », affirme qu’on doit ce terme au journaliste Pat Sweeney. Le mouvement est né dans une discothèque appelée The Fridge, où Bruno de Florence, un artiste français basé à Londres, a installé vingt-cinq téléviseurs reliés, empilés les uns sur les autres et répartis autour d’une piste de danse. En 1984, BARBER a publié une compilation vidéo distribuée indépendamment intitulée « The Greatest Hits of Scratch Video » [Vol. 1], suivie d’un deuxième volume l’année suivante. On y trouve représentés les artistes GEORGE BARBER, Kim Flitcroft et Sandra Goldbacher, Jeffrey Hinton, The Duvet Brothers, John Scarlett Davis, John Maybury, Gorilla Tapes et Tim Leandro.

Cathode Fuck / T.V. Sphincter | CHRIS GORE, États-Unis, 1986 / 1987
« Cathode Fuck » et sa suite « T.V. Sphincter », sortie un an plus tard, ont été réalisés par CHRIS GORE, fondateur du magazine Film Threat, l’un des premiers endroits à avoir fait la promotion des « mixtapes » vidéo. Les compilations vidéo étaient étroitement liées à la culture parallèle des zines et au marché d’échange de cassettes que de nombreux zines alimentaient, en particulier à une époque où tout n’était pas encore accessible sur Internet. Dans son histoire du mixage vidéo intitulée « The Television Screen is the Retina of the Mind’s Eye », Dave Carter suggère que « les structures de « Cathode Fuck » et de sa suite, «  T.V. Sphincter », sont les mêmes et incarnent le modèle même de la compilation vidéo ».

Broken | NINE INCH NAILS (NIN), États-Unis, 1993
La fameuse vidéocassette « Broken » n’a jamais été commercialisée, mais elle a été piratée abondamment. Elle contient des vidéos musicales sur la musique de NINE INCH NAILS, montées par Peter Christopherson pour ressembler à une « mixtape » vidéo. Rob Sheridan, directeur artistique pour NINE INCH NAILS, se souvient avoir trouvé une copie de cette cassette dans sa jeunesse. « Les jeunes d’aujourd’hui, dit-il, ne comprendront jamais le plaisir de traquer un artefact vidéo rare, puisque tout est maintenant à portée de recherche sur Google… [« Broken »] n’a jamais été conçue pour un accès à la demande, ni pour les masses au cœur tendre qui ne font aucun effort pour la trouver. »

Sociology 666 | RICHARD ALTMAN & SEBASTIAN CAPONE, Canada, 1996
À la fois critique des médias de masse et juvénilisme, cette œuvre s’inspire autant de Marshal McLuhan que de Craig Baldwin. Ce collage vidéo est divisé en six parties : « Violence » | « War » | « Drugs » | «  Surrealism  » | « Carnage » | « Sociology 666 ». Notre programme présente la partie « Sociology 666 » dans son intégralité.

En plus de promouvoir les « mixtape » vidéo, le magazine Film Threat en chroniquait à l’occasion. Une de ces chroniques, portant sur « Sociology 666 » (1996), est particulièrement remarquable. On la doit au critique de cinéma Merle Bertrand. Celui-ci se plaint :

« Copier son film ou sa vidéo sur une cassette usagée, c’est ringard… mais compréhensible. Même si la bande magnétique coûte presque rien, le recyclage peut faire économiser quelques centaines de dollars à un cinéaste affamé, une somme non négligeable. Pourtant, SEBASTIAN CAPONE et RICHARD ALTMAN n’ont certainement pas gagné de points en envoyant leur cassette dans l’état où nous l’avons reçue : sans pochette, les mots « Filth Tape #1 » griffonnés au stylo sur une étiquette à moitié décollée, et le toujours populaire « 666 » gribouillé sur la tranche. C’est plus qu’un bête problème cosmétique. Je ne sais même pas comment s’appelle ce truc ! »

Bien qu’il critique le manque de professionnalisme des cinéastes et qu’il loue « l’ampleur des recherches et le temps nécessaire pour accumuler cette quantité de clips obscurs », Bertrand avance que la vidéo elle-même n’est « ni agréable ni intéressante à regarder ». Or, il ressort de sa chronique qu’il ne s’est intéressé à l’œuvre que superficiellement.

La plupart des clips sont tirés de films et d’émissions de télévision diffusées sur le câble, mais la compilation inclut aussi des séquences originales de CAPONE et d’ALTMAN, une scène tout particulièrement qui commence avec les cinéastes récitant une réplique à la McLuhan qui semble traduire la raison d’être de l’œuvre : « La déconstruction du message commence par la destruction du support. » (Divulgâchage : cette partie n’a pas été retenue dans le programme.) Après cette phrase, les cinéastes se mettent à détruire des téléviseurs. Or, en prenant cette déclaration à la lettre comme le fait Bertrand, on passe à côté de l’essentiel : c’est l’ensemble de cette œuvre vidéo qui représente une forme de déconstruction du support.

WEB 2.CINEMA SPK Despair 001

Karl Lemieux, commissaire aux films expérimentaux